Précisions sur la réception tacite d'un ouvrage de construction : Civ. 3e, 13 juill. 2016, n° 15-17.208

Précisions sur la réception tacite

En droit de la construction, la réception d’un ouvrage est une opération fondamentale en ce qu’elle marque le point de départ des garanties dues par le constructeur et notamment celui de la garantie décennale outre la garantie de parfait achèvement ou la garantie biennale.

Les opérations de réception des travaux sont prévues par les articles 1792-6 du Code civil qui prévoit une réception amiable ou judiciaire. Par une construction prétorienne, la Cour de cassation est venue ajouter une forme de réception d’un ouvrage : la réception tacite.

Réception tacite et contraintes économiques

Dans cette espèce les maîtres d’ouvrage avaient confié à une société la construction du gros œuvre de leur maison. Pour des motifs économiques, les maîtres de l’ouvrage étaient contraints de prendre possession des lieux avant qu’une réception expresse n’intervienne. Suite à cette prise de possession, des désordres apparurent de sorte que les Epoux X étaient contraint d’assigner en référé l’entreprise locateur d’ouvrage prise en la personne de son liquidateur judiciaire ainsi que son assureur décennal.

Survient alors le débat classique en l’absence de réception expresse.

Les maîtres d’ouvrage sollicitaient que soit prononcé la réception tacite, tant dis que l’assureur décennal soutenait que la réception ne pouvait être tacite puisqu’elle avait été contrainte. Au soutien de son opposition, l’assureur faisait valoir que la prise de possession n’était intervenue que parce que les maîtres d’ouvrage étaient contraints économiquement en ce qu’ils ne pouvaient s’acquitter d’un loyer en plus du crédit afférent aux travaux de construction. Cet élément avait été avancé dans une correspondance envoyée à l’entrepreneur dans laquelle était également formulée un nombre conséquent d’inexécutions contractuelles.

La Cour d’appel de PAU avaiet ainsi écarté la réception tacite de l’ouvrage arguant d’un défaut de paiement complet du solde des travaux et d’un défaut de preuve de la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de réceptionner l’ouvrage. Ce faisant, les juges du fond avaient écarté la réception tacite en affirmant que la prise de possession avait, dans cette espèce, un caractère contraint.

Par un arrêt du 13 juillet 2016, la Cour de cassation vient alors censurer ce raisonnement en revenant sur la qualification des protestations du maître de l’ouvrage retenue par la cour d’appel reconnaissant, en l’espèce, l’existence d’une réception tacite.

Ainsi, outre la contrainte économique ayant présider à la prise de possession, l’existence de courriers de protestation n’ont, à l’évidence, pas été déterminant pour démontrer la volonté de ne pas réceptionner l’ouvrage. L’arrêt présenté opère donc un distingo entre courrier mentionnant des réserves et preuve de la volonté de ne pas réceptionner l’ouvrage. En effet, rappelons que la preuve de la volonté de ne pas réceptionner reste à la charge de l’entrepreneur.

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